Le Grand Echiquier de Brzezinski

Zbigniew Brzezinski est un conseiller stratégique influent auprès des présidents américains depuis Kennedy. Son influence sur la politique étrangère en Afghanistan, l'expansion de l'Otan et la contention en Ukraine est décrite candidement dans son ouvrage de 1997 : le grand échiquier, dont l'agenda pour l'élargissement de l'Otan et de l'UE est suivi à la lettre par les administrations américaines successives de 1998 à 2008 jusqu'à la contention Ukrainienne. 

Issu d'une famille aristocratique polonaise déracinée par l'invasion Germano-Soviétique de la Pologne alors que son père est consul de Pologne en Amérique, il sera profondément marqué par la violence des relations entre États.

Brzezinsky (droite) en 1978 Credit: wikicommons

Brzezinski avec Kissinger est l'un des "grands stratèges" de la guerre froide. Les aparatchiks américains ont parmi leurs sciences politiques la "grande stratégie", dont l'objet est de maintenir l'hégémonie. 

Brzezinski sera critiqué pour avoir favorisé le support de la CIA des insurgents Mujahideens dans les années 70, l'opération ratée de sauvetage des otages americains en Iran, son soutien au bombardement de la Serbie par l'Otan en dehors du cadre international, et pour son titre, "le grand échiquier", qui présente la politique mondiale comme un jeu à somme nulle. Je retiens ci-dessous quelques passages en italique de cet ouvrage plus influent que prémonitoire qui montre la perception du monde par Washington et les racourcis qui ont été fait s'agissant de politique européenne.

Géostrategie: un libéralisme hégémonique

Pour l'Amérique, le principal prix géopolitique est l'Eurasie. Huntington a raison d'affirmer avec audace: un monde sans primauté des États-Unis sera un monde avec plus de violence et de désordre, moins de démocratie et de croissance économique qu'un monde où les États-Unis continuent d'avoir plus d'influence que tout autre pays dans les affaires mondiales. La primauté internationale maintenue des États-Unis est essentielle au bien-être et à la sécurité des Américains et à l'avenir de la liberté, de la démocratie, des économies ouvertes et de l'ordre international dans le monde. 

Brzezinski se réfere aux théories de Halford Mackinder. Stratège Anglais qui suggerait l'indépendance de l'Iran face à la Russie pour preserver l'hégémonie britannique.
L'Eurasie axiale. Credit: wikicommons


L'Eurasie est le plus grand continent du globe et est géopolitiquement axiale. Le contrôle de l'Eurasie entraînerait presque automatiquement la subordination de l'Afrique.

Le scénario le plus dangereux serait une grande coalition de la Chine, de la Russie et peut-être de l'Iran. 

Le système mondial américain actuellement dominant, au sein duquel « la menace de guerre est hors de question », n'est susceptible d'être stable que dans les parties du monde où la primauté américaine, guidée par une géostratégie à long terme, repose sur des systèmes sociopolitiques compatibles et homogènes, reliés entre eux par des cadres multilatéraux dominés par les États-Unis. 

Les armes nucléaires ont considérablement réduit l'utilité de la guerre en tant qu'outil de politique ou même en tant que menace. L'interdépendance économique croissante entre les nations rend l'exploitation politique du chantage économique moins convaincante. 

La géostratégie consiste à empêcher la collusion et à maintenir la dépendance sécuritaire entre les vassaux, à les maintenir affluents, obéissants et protégés, et à empêcher les barbares de se rassembler. 

Brzezinski est l'oppose d'un isolationniste, il veut d'une Amérique impliquée en Asie centrale. Il est "libéral" dans la mesure où il estime que la démocratie américaine est garante de certaines libertés et de valeurs objectivement préférables. 

Ce point est disputé par les réalistes: chaque pays défend l'intérêt national. Chaque diplomate soutient que le meilleur des régimes est celui du pays qu'il représente. 

Il est réaliste lorsque explique qu'une certaine homogénéité et correspondance des régimes politiques en place permet un meilleur dialogue et plus de tolérance.

Acteurs et Pivots Géostrategiques

En toute candeur, Brzezinski décrit sa grille interprétative à l'intention des décideurs de Washington:

Les États géo-stratégiquement actifs sont ceux qui ont la capacité et la volonté nationale d'exercer un pouvoir ou une influence au-delà de leurs frontières. La France, l'Allemagne, la Russie, la Chine et l'Inde sont des États majeurs et actifs, tandis que la Grande-Bretagne, le Japon et l'Indonésie, bien que des pays certes très importants, n'en ont pas la volonté politique. 

  • La France, en particulier, a sa propre conception géostratégique de l'Europe, qui diffère à certains égards significatifs de celle des États-Unis, et est encline à s'engager dans des manœuvres tactiques destinées à opposer la Russie à l'Amérique et la Grande-Bretagne à l'Allemagne.
  • la France et l'Allemagne s'estiment habilitées à représenter les intérêts européens dans leurs relations avec la Russie. 
  • la Grande-Bretagne est de moins en moins pertinente à cause de son ambivalence vis-à-vis de l'unification européenne et de son attachement à une relation spéciale déclinante avec l'Amérique. Son amitié a besoin d'être nourrie, mais ses politiques n'appellent pas une attention soutenue.
  •  La Russie, reste un acteur géostratégique majeur, 
  • le Japon préfère ne pas s'engager dans la politique du continent asiatique, c'est la retenue du Japon que l'Amérique doit cultiver très subtilement. 
  • L'Inde est en train de s'établir en tant que puissance régionale et se perçoit en tant qu'acteur mondial potentiellement majeur 

Les pivots géopolitiques sont les États dont l'importance ne découle pas de leur pouvoir et de leur motivation, mais plutôt de leur situation sensible et des conséquences de leur condition potentiellement vulnérable sur le comportement des acteurs géostratégiques. L'Ukraine, l'Azerbaïdjan, la Corée du Sud, la Turquie et l'Iran jouent le rôle de pivots géopolitiques d'une importance cruciale, bien que la Turquie et l'Iran soient dans une certaine mesure – dans les limites de leurs capacités plus limitées – également actifs d'un point de vue géostratégique.

    • L'Ukraine, un espace nouveau et important Sans l'Ukraine, la Russie cesse d'être un empire eurasien. La Russie sans l'Ukraine peut encore aspirer au statut impérial, mais elle deviendrait alors un État impérial à prédominance asiatique. Si Moscou reprend le contrôle de l'Ukraine, avec ses 52 millions d'habitants et ses ressources majeures ainsi que son accès à la mer Noire, la Russie retrouve automatiquement les moyens de devenir un puissant État impérial, couvrant l'Europe et l'Asie. 
    • L'Azerbaïdjan, avec ses vastes ressources énergétiques, est également critique sur le plan géopolitique. C'est le bouchon dans la bouteille contenant les richesses du bassin de la mer Caspienne et de l'Asie centrale. Indépendamment de l'hostilité iranienne actuelle envers les États-Unis, agit comme une barrière à toute menace russe à long terme pour les intérêts américains dans la région du golfe Persique. 
    • La Corée du Sud est un pivot géopolitique de l'Extrême-Orient. Ses liens étroits avec les États-Unis permettent à l'Amérique de protéger le Japon et empêcher ainsi le Japon de devenir une puissance militaire indépendante et majeure

    La fable du Partenariat Égal

    Depuis l'époque de l'administration Kennedy, l'invocation standard a été celle du « partenariat égal ». Washington a toujours proclamé son désir de voir l'Europe émerger Washington souhaite-t-il vraiment une Europe qui soit un partenaire véritablement égal dans les affaires mondiales, ou préfère-t-il une alliance inégale? 

    Les différences américano-européennes sur l'Iran et l'Irak ont également été traitées par les États-Unis non pas comme une question entre égaux, mais comme une question d'insubordination. 

    Le soutien américain à l'unité européenne s'étend également à la question de savoir comment l'unité européenne doit être définie, en particulier en ce qui concerne le pays, le cas échéant, qui devrait diriger une Europe unie. Washington a également montré une nette préférence pour le leadership allemand – plutôt que français – en Europe. 

    Compte tenu du consensus croissant sur l'opportunité d'admettre les nations d'Europe centrale tant pour l'UE que pour l'OTAN, la signification pratique de cette question attire l'attention sur le statut futur des républiques baltes et peut-être aussi celui de l'Ukraine. 

    L'Empire Russe: Gardien des Balkans d'Asie centrale

    La Russie démocratique serait plus favorable aux valeurs partagées par l'Amérique et l'Europe et donc aussi plus susceptible de devenir un partenaire junior dans la formation d'une Eurasie plus stable et coopérative. L'establishment de la politique étrangère russe (composé en grande partie d'anciens responsables soviétiques) nourrit toujours un désir profondément enraciné d'un rôle eurasien spécial, qui entraînerait par conséquent la subordination à Moscou des États post-soviétiques nouvellement indépendants. 

    Le redressement interne de la Russie est essentiel à la démocratisation de la Russie et à son éventuelle européanisation. Mais toute récupération de son potentiel impérial serait contraire à ces deux objectifs. 

    Les coûts de l'exclusion de la Russie pourraient être élevés – créant une prophétie auto-réalisatrice dans la mentalité russe.

     Les tensions internes à l'intérieur de la Turquie et l'Iran sont susceptibles non seulement de s'aggraver, mais de réduire considérablement le rôle stabilisateur que ces États sont capables de jouer dans cette région volcanique. 

    Tout en préconisant l’extension de l'Otan, Brzezinski met en garde contre l'isolation de la Russie, et souligne l’instabilité des 25 pays d'Asie centrale succédant à l'explosion de l'empire soviétique.

    Chine et Japon

    Supposons que la Chine ne se démocratise pas mais continue de croître en puissance économique et militaire? tout effort visant à empêcher que cela ne se produise pourrait entraîner une intensification du conflit avec la Chine. 

    Un tel conflit pourrait mettre à rude épreuve les relations américano-japonaises, car il est loin d'être certain que le Japon veuille suivre l'exemple de l'Amérique pour contenir la Chine. 

    Si le Japon a brièvement tenté de se rapprocher de la Chine sous Abe et Fukuda entre 2006 et 2008, le militarisme de la Chine concenant les îlots disputés et des pathologies entretenues par le gouvernement Chinois (38% des chinois considèrent que le Japon est un ennemi) ont ramené le Japon dans le giron de son ancien vainqueur: les Etats-Unis.

    L'Otan: tête de pont Américaine en Eurasie

    Contrairement aux liens de l'Amérique avec le Japon, l'alliance atlantique, renforce l'influence politique et la puissance militaire américaines directement sur le continent eurasien. 

    À ce stade des relations américano-européennes, alors que les nations européennes alliées dépendent encore fortement de la protection de la sécurité des États-Unis, toute expansion de la portée de l'Europe devient automatiquement une expansion de la portée de l'influence directe des États-Unis. Une Europe politique n'a pas encore émergé. L'Europe occidentale, et de plus en plus l'Europe centrale, reste en grande partie un protectorat américain, avec ses États alliés rappelant les anciens vassaux et affluents. 

    La situation est aggravée par un déclin plus généralisé de la vitalité interne de l'Europe. L'anti-américanisme européen résiduel, actuellement assez faible, est curieusement cynique : les Européens déplorent « l'hégémonie » américaine mais se réconfortent d'être protégés par elle. 

    Le problème auquel l'Europe est de plus en plus confrontée est celui d'un système de protection sociale excessivement lourd qui sape la vitalité de son économie, tandis que la résistance passionnée à toute réforme par des intérêts particuliers détourne l'attention politique européenne vers l'intérieur. 

    L'idée d'unité jouit toujours d'un soutien populaire important, mais elle a tendance à être tiède, manquant de passion et de sens de la mission. 

    Brzezinski voit que face à ses défis géostrategiques, l'Europe de l'Ouest semble déjà en 1997 s'effondrer sous le poids de son Etat providence qui, mis en place en 1945, n'a pas ete reformé malgré l'évolution démographique.

    Délire néo-impérial Francais et Expiation Allemande

    Brzezinski donne une grille de lecture intéressante des motivations franco-allemandes:

    Les élites politiques de deux grandes nations européennes – la France et l'Allemagne – restent largement engagées dans l'objectif de façonner et de définir une Europe que la France cherche à réincarner en Europe ; L'Allemagne espère une rédemption par l'Europe. 

    La création d'une véritable Europe – selon les mots de Charles De Gaulle, « de l'Atlantique à l'Oural » – devait remédier à cette situation déplorable. Et une telle Europe, puisqu'elle serait dirigée par Paris, retrouverait simultanément pour la France la grandeur que les Français considèrent encore comme le destin particulier de leur nation. 

    Pour l'Allemagne, un engagement envers l'Europe est la base de la rédemption nationale, Pour l'Allemagne, rédemption + sécurité = Europe + Amérique. Cette formule definit la posture et la politique de l'Allemagne, faisant de l'Allemagne à la fois le vrai bon citoyen de l'Europe et le plus fervent partisan européen de l'Amérique. 

    Il y a un élément d'obsession délirante dans la préoccupation de l'élite politique française avec l'idée que la France est toujours une puissance mondiale. 

    Avec la Grande-Bretagne auto-marginalisée et essentiellement un appendice de la puissance américaine et avec l'Allemagne divisée pendant une grande partie de la guerre froide et toujours handicapée par son histoire du XXe siècle, la France pourrait saisir l'idée de l'Europe, s'identifier à elle et l'usurper comme identique à la conception que la France se fait d'elle-même. 

    La réunification de l'Allemagne a également radicalement changé les paramètres réels de la politique européenne. C'était à la fois une défaite géopolitique pour la Russie et pour la France. Avec la disparition de l'Union soviétique et la réunification de l'Allemagne, le lien avec l'Amérique fournissait désormais le cadre sous lequel l'Allemagne pouvait assumer plus ouvertement un rôle de leadership en Europe centrale sans menacer simultanément ses voisins. 

    Un coup d'œil sur la carte de la vaste masse continentale eurasienne souligne l'importance géopolitique pour l'Amérique de la tête de pont européenne – ainsi que sa modestie géographique. L'écart existant entre le souci mondial de l'Amérique pour la stabilité et pour la diffusion de la démocratie qui en découle et l'indifférence apparente de l'Europe à l'égard de ces questions (malgré le statut autoproclamé de la France en tant que puissance mondiale) doit être comblé.

    Laissés à eux-mêmes, les Européens courent le risque d'être absorbés par leurs préoccupations sociales internes. La reprise économique de l'Europe a occulté les coûts à long terme de son succès apparent. La crise de légitimité politique et de vitalité économique à laquelle l'Europe occidentale est de plus en plus confrontée – mais qu'elle est incapable de surmonter – est profondément enracinée dans l'expansion généralisée de la structure sociale parrainée par l'État qui favorise le paternalisme, le protectionnisme.

    Les intérêts de l'Allemagne sont congruents, voire sublimés, par ceux de l'UE et de l'OTAN. L'Amérique devrait réitérer, en paroles et en actes, sa volonté de traiter finalement avec l'UE en tant que partenaire politique et de sécurité mondial de l'Amérique et pas seulement en tant que marché commun régional.

    Agenda d'Extension de Brzezinski

    L'agenda donne par l'auteur dans ce livre de 1997 a été suivi à la lettre par Washington et l'UE...

    L'OTAN assure la sécurité européenne et fournit un cadre stable pour la poursuite de l'unité européenne. L'UEO englobera certains États membres de l'UE qui, pour diverses raisons géopolitiques ou historiques, pourraient choisir de ne pas demander l'adhésion à l'OTAN. Il pourrait s'agir de la Finlande ou de la Suède, voire de l'Autriche, qui ont déjà acquis le statut d'observateur auprès de l'UEO. 

    La France n'est pas assez forte pour faire obstruction à l'Amérique sur les fondamentaux géostratégiques de la politique européenne américaine ou pour devenir par elle-même un leader de l'Europe en tant que telle. Par conséquent, ses particularités et même ses crises de colère peuvent être tolérées. 

    Toute l'Europe du Sud est de plus en plus préoccupée par la menace sociopolitique posée par l'instabilité le long du littoral sud de la Méditerranée. Une politique globale des États-Unis pour l'Eurasie dans son ensemble ne sera pas possible si l'effort d'élargissement de l'OTAN, lancé par les États-Unis, stagne et vacille. 

    La définition occidentale plus étroite de l'Europe a été associée à Rome et à son héritage historique. Mais la tradition chrétienne de l'Europe a également impliqué Byzance et son émanation orthodoxe russe. Ainsi, culturellement, l'Europe est plus que l'Europe pétrinienne, Dans les circonstances actuelles, l'élargissement de l'OTAN à la Pologne, à la République tchèque et à la Hongrie – probablement d'ici 1999 – semble probable. 

    Après cette étape initiale mais significative, il est probable que toute expansion ultérieure de l'alliance coïncidera avec l'élargissement de l'UE ou suivra celle-ci. Néanmoins, après que les trois premiers nouveaux membres de l'OTAN auront également rejoint l'UE, l'UE et l'OTAN devront se pencher sur la question de l'extension de l'adhésion aux républiques baltes, à la Slovénie, à la Roumanie, à la Bulgarie et à la Slovaquie, et aussi, éventuellement, à l'Ukraine. 

    En 1999, les premiers nouveaux membres d'Europe centrale auront été admis dans l'OTAN, bien que leur entrée dans l'UE n'interviendra probablement pas avant 2002 ou 2003. Dans l'intervalle, l'UE entamera des négociations d'adhésion avec les républiques baltes, et l'OTAN commencera également à avancer sur la question de leur adhésion ainsi que celle de la Roumanie, leur adhésion devant être achevée d'ici 2005. 

    À un moment donné à ce stade, les autres États des Balkans pourraient également devenir éligibles. L'adhésion des États baltes pourrait inciter la Suède et la Finlande à envisager également d'adhérer à l'OTAN. 

    Quelque part entre 2005 et 2010, l'Ukraine, surtout si, entre-temps, le pays a fait des progrès significatifs dans ses réformes intérieures et a réussi à être identifié de manière plus évidente comme un pays d'Europe centrale, devrait se préparer à des négociations sérieuses avec l'UE et l'OTAN. 

    La Russie: exclue plus que prévu depuis 1997?

    En 2010, la collaboration politique Franco-Allemand-Polonais-Ukrainienne, impliquant quelque 230 millions de personnes, pourrait évoluer vers un partenariat renforçant la profondeur géostratégique de l'Europe.

    Mais la mise à l'écart de la Russie ne faisait pas partie du plan Brzezinskien:

    La Russie devrait être continuellement rassurée sur le fait que les portes de l'Europe sont ouvertes, tout comme les portes de sa participation éventuelle à un système transatlantique élargi de sécurité.

    Si le concept de « partenariat stratégique mature » est flatteur, il est également trompeur. L'Amérique n'était pas encline à partager la puissance mondiale avec la Russie et ne pouvait pas le faire, la Russie était tout simplement trop faible.

    Aussi, de l'avis de Washington, l'Allemagne, le Japon et la Chine étaient au moins aussi importants.

    Celle-ci se préfigurait déjà, étant donné que la Russie se voit comme une superpuissance et l'Amérique lui refuserait ce role. 

    D'autres éléments ont joué que Brzezinski ne mentionne pas. (1) les pathologies des pays nouvellement intégrés (pays baltes, pologne) qui voulaient exclure la Russie de toute coopération sécuritaire, (2) l'élection du président Trump qui fit que les démocrates désignent la Russie comme enemi stratégique à des fins de politique intérieure, alors que (3) le complexe militaro-industriel américain avait besoin d'un ennemi conventionel pour justifier son niveau de dépenses.

    On ne construit pas 15 porte-avions nucléaires pour chasser des pirates somaliens en zodiac, on ne concoit pas des avions de chasses F22 furtifs coutant trois cent millions la pièce pour se battre contre des éleveurs de chèvres afghans. Il faut bien trouver ces ennemis conventionels quelque part.

    Après 1997

    En 2004, Brzezinski exprime son opposition à la politique de George Bush et sa guerre sans fin contre le terorisme qui l'amène à la guerre et à destabiliser les "balkans d'asie centrale". La ligne éditoriale des médias occidentaux fait qu'ils ne relaient pas ces commentaires.

    En 2014, il préconise de punir la Russie pour son annexion de la Crimée mais aussi de lui fournir des garanties que l'Ukraine ne rejoindra pas l'Otan.

    Très affecté par l'élection du président Trump en 2016, en Mai 2017, douze jours avant sa mort, Brzezinski lance un dernier tweet: "un leadership sophistiqué est la condition sine qua non d'un ordre mondial stable".

    L'agenda d'expansion de l'Otan et de l'UE présentés dans ce livre sont trop bien validé par la suite pour etre le fruit d'une concordance historique. Ce livre a été utilisé par Washington comme feuille de route pour sa politique d'Europe de l'Est, ce qui nous amène à la contention Ukrainienne actuelle.

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