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Beveridge en 1943: garantir un minimum en préservant l'incitation au travail |
Les Français payent maintenant plus du double de ce qu'ils devraient pour leur retraite, et ce coût va encore augmenter. Ce coût croissant pèse sur le pouvoir d'achat. Est-il trop tard pour évoluer vers un système mixte comme le système suisse des trois piliers ?
Retraites par Capitalisation : Liberté, Imprévisibilité
Combien faut-il épargner pour se garantir une retraite autofinancée ? La réponse dépend fortement du domaine et de la période d’investissement.
Si les fonds sont investis à long terme sur les marches d’actions mondiaux, la performance sur les 120 dernières années est de 5 % au-dessus du niveau d’inflation. Dans ce cas, il faut épargner 12 % de ses revenus dès 18 ans pour pouvoir prendre sa retraite à 60 ans jusqu’à 100 ans.
Une retraite par capitalisation coûte typiquement 10 % de leur salaire aux employés (5 % sont mis par l'employé, et 5 % abondés par l'employeur).
Il faut noter que ces chiffres supposent que le salaire suive l’inflation. Pour une retraite à 80 % du salaire moyen, il faut retenir 80 % de ce taux d’épargne soit 5 % à 12 %.
La retraite par capitalisation est vulnérable. Deux guerres mondiales et la pire dépression en 200 ans ont démontré sa fragilité. Les systèmes par capitalisation supposent qu'il y a toujours des investissements avec 5 % de rendement au-dessus de l'inflation, et l'on ne peut pas garantir ce rendement, bien qu'un tel rendement ait été possible même sous l'ancien régime.
- Aux US avec un rendement de 6,4%, il suffisait d’épargner 7 % de ses revenus
- En Europe à un rendement de 4,1%, il fallait 15 % d’effort d’épargne.
Une retraite par capitalisation coûte typiquement 10 % de leur salaire aux employés (5 % sont mis par l'employé, et 5 % abondés par l'employeur).
Il faut noter que ces chiffres supposent que le salaire suive l’inflation. Pour une retraite à 80 % du salaire moyen, il faut retenir 80 % de ce taux d’épargne soit 5 % à 12 %.
La retraite par capitalisation est vulnérable. Deux guerres mondiales et la pire dépression en 200 ans ont démontré sa fragilité. Les systèmes par capitalisation supposent qu'il y a toujours des investissements avec 5 % de rendement au-dessus de l'inflation, et l'on ne peut pas garantir ce rendement, bien qu'un tel rendement ait été possible même sous l'ancien régime.
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Jean Jaurès: la gauche en faveur de la capitalisation avant 1914 |
Enfin, la retraite par capitalisation suppose un investissement judicieux de l'épargne. Dans la plupart des pays ou la retraite est financée par capitalisation, l'investissement obligataire y est encore important en dépit d'une sous-performance prévue face à l'inflation.
Retraites par Répartition : Coercition et Pénurie Planifiée
La retraite par distribution est insensible aux aléas des marchés. Les revenus des actifs sont directement partagés avec les retraités. Ce partage est décidé par le gouvernement plutôt que par les prix des marchés de capitaux. C'est un amortisseur de crise macro-économique qui garanti que le pouvoir d'achat des retraités ne s'effondre pas avec les cours en bourse.
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Otto von Bismark: achète le soutien des retraités pour l'Etat Prussien |
L'inconvénient est que si une personne active doit supporter un retraité tout de suite, il doit y consacrer 50 % de ses revenus. Le fait d’investir les fonds longtemps avant d’en tirer un revenu permet de soutenir un retraité avec 7 % à 15 % d’effort d'épargne pour une pension identique au salaire.
La situation économique était la plus difficile entre 1918 et 1940 pour les retraites. Pourtant, le système de retraite est plus récent :
La situation économique était la plus difficile entre 1918 et 1940 pour les retraites. Pourtant, le système de retraite est plus récent :
- Création d'une retraite par répartition le 15 Mars 1941, Philippe Pétain declare: « Je tiens les promesses, même celles des autres lorsque ces promesses sont fondées sur la justice » sous l’égide d'un ministre du travail de la CGT R Belin, et de P Laroque et A Parodi. Tandis que Mr Belin continuera la collaboration, Mrs Laroque et Parodi quitteront ou seront congédié de ce gouvernement. En 1946, un système de retraite par répartition continue sous l'égide de ces deux derniers où l’on distribue aux personnes âgées de plus de 65 ans une retraite financée par les actifs.
- En 1983, l’âge de la retraite est porté à 60 ans, c'est une décision politique progressiste qui diminue le pourcentage d'actif et augmente le besoin de financement annuel des retraites.
- En 2003, les fonctionnaires peuvent prendre leur retraite dès 56 ans dès lors qu’ils ont travaillé 40 ans.
- En 2010, l’âge de la retraite est repoussé de 60 ans 62 ans.
Electoralement, le groupe des retraités (16 millions), chômeurs (3 millions) et fonctionaires (6 millions) comporte 25 millions d'electeurs qui tirent leurs revenus de prélevements pbligatoires et le maintiennent par leur vote, contre 20 millions du travailleurs du privé qui doivent produire quelque chose que des clients décident d'acheter pour etre payés. On a franchi il y bien longtemps le seuil de l'electeur médian, avec les conséquences de convergence des revenus vers un niveau de subsistence caractéristique d'une societé ou la recherche de rente promet la meilleure rémunération.
Le coût de la retraite solidaire est donc de 32 % des salaires des actifs. Ces 32 % sont financés par les actifs qui payent 25 % de leur salaire pour financer la retraite des autres, les 7 % restant sont financés par la CSG.
Il y a donc là deux problèmes :
- Pour les actifs : le poids des retraités est le double par rapport au 7 % à 15 % du système par capitalisation,
- Pour les retraités : ils ne touchent que 54 % de ce qu'ils toucheraient avec le système de capitalisation.
Le Fantôme de Lord Keynes
La mise en place d'une retraite par répartition est aussi une manière de faire participer une plus grande population à la croissance du pays. C'est une mesure de stimulation par la consommation recommandée depuis les années 30 en cas de crise liée à une surcapacité productive.La retraite par répartition aurait ainsi réduit la formation de capital en France et contribué à stimuler la demande pendant la reconstruction de l'Europe après 1945. Cet effet sur la consommation est d'autant plus efficace que les retraites sont modestes et donc sensibles à la stimulation.
La Suisse et les États-Unis ont aussi mis en place un minimum vital solidaire aidant la population la plus démunie à une stimulation de la consommation, mais les retraites dorées sont financées par capitalisation.
La transition semble nécessaire pour faire face à l'allongement de la durée de vie et la baisse de la natalité.
Fertilité et Espérance de Vie : Deux Facteurs Inexorables
La France compte maintenant 16 millions de retraites pour 26 millions d’actifs, soit 41 %. Il faudrait donc 5 enfants par femme en moyenne, ou bien que l'espérance de vie à l'age de la retraite diminue de moitié pour que le système par répartition soit mieux adapté que la capitalisation pour la démographie française.
La fertilité en France était aux alentours de 3 pendant les 30 glorieuses entre 1950 et 1970, avant de passer en dessous de 2 dans les années 70. On n’a jamais eu 4 enfants par femmes. L’espérance de vie à 65 ans est passée de 73 ans à 80 ans dans tous les pays développés, tandis que la cohorte de personnes atteignant l’âge de la retraite a fortement augmenté.
Quand Réformer : Histoire Française
L’augmentation du poids des retraites sur les actifs depuis 1945 est la conséquence de ces données démographiques. L’ensemble du dispositif français de sécurité sociale (assurance maladie et retraites) ne coûtant que 3 % du PIB de 1947 jusques 62 (selon l'Insee en 1968). Il apparaît que la France a laissé passer une opportunité de réforme entre 1962 et 1968.
Pouvait-on espérer avant 1968 que la croissance paierait la dette sociale ?
En pratique, la croissance de la France et de l'Allemagne pendant les trente glorieuses était beaucoup plus élevée que celle des États-unis et de l'Angleterre en raison de son PIB par habitant bien inférieur pendant la reconstruction. L'effet de ces politiques Keynésiennes semblait être de garantir une croissance de 8 % au-dessus de l'inflation. Qui peut dire quelle eut été la croissance si on favorisait l'investissement plutôt que de stimuler directement la consommation durant cette période ?
Cette question pouvait sembler alors indécidable. En théorie, on savait que les retraites augmentent avec le revenu par habitant et que la réforme était nécessaire.
On voit 50 ans plus tard que la France scellait un dispositif qui allait engendrer une sous compétitivité structurelle.
- Après 1968, Mr Giscard D’Estaing a dû faire face à la crise, et tente une relance en 1972, en 1974, il dit solennellement : Le gouvernement fera le nécessaire à temps pour vous protéger du chômage. Il en a la volonté et il en a les moyens.
- Mr Mitterrand en 1981 tente encore une relance par la consommation alors que les autres pays mettent en place des systèmes de retraite par capitalisation. Après deux septennats, il dit cyniquement en 1993 : Dans la lutte contre le chômage, on a tout essayé
- Alors que la démographie incitait au rehaussement de l’âge de la retraite et au passage à la retraite par capitalisation, la gauche lâche en 1983 une vague d'anciens, qui tels des sauterelles, vont se nourrir « sur la bête » dès 60 ans.
Contrairement à leurs électeurs, les politiciens qui ont pris ces décisions ont travaillé bien au delà de leurs 65 ans. Cette prodigalité relève plus de l'ambition de figurer parmi les grands hommes. Il fallait donc accorder au nom du progrès des bienfaits à la mesure de ceux du Front Populaire en 1936 et du programme des Jours Heureux du Conseil National de la Résistance en 1945.
La Main Invisible Qui Décide
La main invisible de la démocratie représentative mène t-elle la France à l'optimum social ? La théorie du choix public fait l'objet d'un billet le mois prochain.
A cause d'une espérance de vie courte, la France payait en 1962 la moitié du coût des retraites par capitalisation. Chaque actif en France paye maintenant 3 à 4 fois le prix qu'on paie à l'étranger.
Une autre maniere d'aborder la question est l'emploi plutot que le cout de ces cotisation. Si les retraites étaient financées par 3% de cotisation en 45, c'est parce, comme s'en plaignait Mr Thorez, les pauvres mourraient a 65 ans alors que leur cotisations servaient a financer les retraites dorée des cols blancs peu nombreux qui vivaient longtemps. La retraite coute maintenant 27% du salaire parce qu'elle finance la cohorte des boomers, qui est en pleine forme. Il ne s'agit pas de regreter un age d'or imaginaire: le systeme exploitait les pauvres en 1945, il exploite maintenant les jeunes au bénéfices des boomers.
Au vu des données démographiques, il faut rehausser l’âge de la retraite ou baisser les pensions. L'alternative est la transition vers un système mixte plus efficace pour le financement des retraites.
Lorsqu'ils sont sondés sur la question, les Français se déclarent pour une retraite plus tôt. Il sera intéressant de voir quel choix social sera fait par la societé francaise, une possibilité en effet est la baisse de qualité des soins, qui diminuerait l'esperance de vie et permettrait d'abaisser l'age de la retraite.
Leur donnera t-on les moyens de prévoir et financer eux-mêmes cette retraite ou s'agit-il à nouveau de la faire financer par la génération à venir ?
Si il y a une grosse différence de pouvoir d'achat et de compétitivité entre cotiser 12% des salaires comme c’était le cas dans le années 60 et devoir cotiser 24% comme c'est le cas maintenant, qu'en sera t-il si ce poids passe à 50% avec 35 ans de vie active après des études jusque 25 ans, et 35 ans de retraite?
Pour d'autres point de vue sur la retraite:
- Madelin: quand les autruches prendront leur retraite les retraites "au pied du mur" en 2003.
- Objectif liberté: dossier retraite, contribution definies, capitalisation, transition une analyse en 2008
- Des hauts et débats: Les retraites en bref (commentaires sur l'évolution du taux de dépendance et la question de la pénibilité, et sur la mini-réformes de 2010)
- Jacques Bichot: un spécialiste qui commente le financement de la secu, auteur de nombreux ouvrages spécialises ou de synthèse ou dont La retraite en Liberté 2017
- Yves Montenay: un probleme demographique avant d'etre financier (commentaires sur les reformes de 2019, et les problèmes démographiques).
- La retraite à points: la proposition de 2019 du gouvernement: ni capitalisation, ni contribution définie.
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